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Sebastien CANTINI

24_01_2019, à Martigues

Sébastien nous reçoit au stade du club de Fos-sur-mer, où il a entrepris sa reconversion et découvre une nouvelle vie. Installés dans les vestiaires, nous commençons à parler de son parcours.

Peux-tu nous parler un peu de ton parcours sportif ?

 

Je suis natif de Martigues et, à l’âge de 15 ans, je suis parti au SC Sedan Ardennes pour faire un essai parce que le club de Martigues avait déposé le bilan. Un essai concluant puisque j’ai signé là-bas et je suis resté au centre de formation jusqu’à l’âge de 18 ans. A 20 ans, j’ai signé professionnel à Sedan et j’ai joué 5 ans là bas, dont une saison de prêt à Vannes. Après, je suis parti pour 2 ans à Arles Avignon. De là, j’ai pris la direction du Paris FC pour 2 ans, et en 2017, j’ai arrêté ma carrière.

 

A quel point le football est-il important pour toi, dans ton équilibre de vie ?

 

Le sport, c’est tout pour moi. Ma famille est très sportive donc je suis né là dedans, notamment dans le football. Le sport m’a inculqué beaucoup de valeurs : surtout la rigueur, et beaucoup de respect aussi. Il y a aussi le partage avec les gens, tes coéquipiers, le fait de faire un sport collectif t’ouvre aux autres.

 

Pendant ta carrière, tu t’es préparé à l’après ? C’est quelque chose à laquelle tu pensais ?

 

Pas du tout. Il faut savoir que moi ça m’est tombé dessus comme ça. C’est peut-être une erreur de ma part, parce que, quand on est joueur professionnel, on te dit : « Fais attention, ta carrière va vite passer, penses à ton après carrière ». Bon sur le coup, tu rigoles parce que tu te dis, c’est un vieux qui te raconte ça. Mais c’est vrai que la carrière est vite passée et que quand ça m’est tombé dessus, je ne savais pas quoi faire, ça a été les deux années les plus dures de ma vie. Dans le sens où, d’un coup, tu passes d’un monde où tu vis de ta passion, tout brille, tu vis dans les paillettes ; et puis, d’un coup, tu retombes les pieds sur terre. Tu te poses vraiment les bonnes questions, tu te retrouves devant le fait accompli. Voilà, tu te demandes : « Qu’est-ce que tu vas faire de ta vie ? » comme c’est quelque chose que je n’avais pas préparé. J’ai eu la chance de rencontrer James Strauss pour la suite de ma reconversion.

Pendant ta carrière, avec l’investissement important dans le football, avais-tu tout de même du temps, de l’énergie pour développer des projets à côté ?

 

Non, je n’avais pas de projet, je n’avais pas préparé. Bon, j’ai passé des diplômes, notamment le BPJEPS, le CPA des métiers du foot parce que je voulais rester dans le sport, dans ce domaine là. Mais je te dis, j’y pensais pas forcement, je me disais que j’avais encore le temps pour préparer cet après-carrière : et c’est là où mon erreur, elle est grande. Bon moi, j’ai eu la chance de rebondir et de bien rebondir aujourd’hui, mais je sais que, quand je parle avec des amis qui sont encore en activité aujourd’hui, c’est rigolo mais le premier truc que je leur dis c’est : « Est-ce que tu penses à ton après-carrière ? ». Je sais par où je suis passé, et je sais l’erreur que l’on peut faire. C’est super important de s’y prendre tôt pour réfléchir et préparer ce qu’on va faire, notamment quand on n’a pas gagné des milles et des cents et qu’on va devoir passer par la case « travail ».

 

Finalement, tu es aussi devenu « le vieux » qui te parlait avant... 

 

C’est exactement ça, je les mets en alerte. Je suis passé de l’autre coté, et je me dis c’est à toi de pouvoir apporter, de faire appel à ton peu d’expérience dans cette transition pour mettre en alerte des collègues parce que c’est super important. Derrière ça, il y a une vie de famille, des enfants.

 

 

Et à part « le vieux », qui était là pendant ta carrière pour t’encourager à te préparer ?

 

Dans les clubs professionnels, dans les centres de formation, il y a des gens qui vous disent : « Pensez à votre après carrière ! ». Mais quand tu as 20 ou 21 ans, qu’on te parle de ton après carrière, tu écoutes mais tu passes au-dessus parce que voilà. Mais bon, tu te rends compte après que c’est une erreur. Plusieurs fois j’ai eu la possibilité de parler avec les anciens du vestiaires qui étaient plus réfléchis, qui me disaient : « Penses dès maintenant à ce que tu pourras faire après, ça arrive très vite ». Je répondais « Oui, oui, oui, tu as raison », mais après je me bougeais pas. Après au niveau des études aussi,  j’avais la possibilité de faire des études, mais j’ai arrêté aussi. Quand tu es dans le monde professionnel, même en ayant les pieds sur terre, tu ne penses pas à tout ça. Parce ça ne t’atteint pas, tu as l’impression d’être au-dessus des autres, au-dessus de tout ça.

 

Tu as parlé des « deux années les plus difficiles de ta vie ». Comment as-tu géré l’arrêt de ta carrière sportive à haut niveau? Quels moyens tu as mis en en œuvre pour ta transition ?

 

Fin de contrat au Paris FC, j’avais un agent, j’avais plusieurs possibilités d’aller jouer dans 2 ou 3 clubs de Ligue 2. Mais après honnêtement, financièrement ça ne m’intéressait pas. Et puis après, j’ai eu des problèmes personnelles, et notamment dans ma famille. Ma femme était enceinte, les jours passent, le mercato qui avance, tu as toujours pas de touches intéressantes, sportivement et financièrement, parce qu’il faut aussi vivre. Et donc à un moment donné, il a fallu faire un choix. Mon agent, quand je lui ai dit qu’en l’absence de bonne proposition, j’allais rester dans ma région auprès de ma mère qui est tombé malade, j’ai compris que ça ne lui a pas forcement plus. Il m’a quitté du jour au lendemain. Ça aussi faut le savoir, quand t’es pro, il a du monde autour de toi, et quand tu ne l’es plus, il y a plus personne. Les amis aussi, tu fais vite le tri. Donc voilà, j’ai fait le choix de rester dans ma région, je voulais toujours jouer à un bon niveau : il y avait Martigues, Consolat. J’ai eu des touches mais ce n’était pas cohérent. Du coup, j’ai atterri à Côte Bleue, et, là bas, ça s’est très mal passé.  Ensuite par mes connaissances, on m’a présenté James Strauss, avec qui le courant est bien passé, dès la première rencontre. Il m’a présenté le projet (Programme Transition), ça m’a tout de suite plu : il fallait que je pense à ma reconversion. Alors, ça a été très délicat, parce je savais qu’en rentrant dedans, je fermais toutes les portes pour ma carrière. Moi qui ne pensais qu’au ballon, qui vivait de ça : c’était une période difficile. Et puis, le truc de se dire : «  Je sais pas ce que je vais faire de ma vie ». Tu es là, tu te dis : « Qu’est ce que je vais faire maintenant ? » Parce que quand il me présente le projet, il me demande : «  Qu’est ce que tu veux faire ? ». Et là, quand tu n’y as jamais réfléchi, c’est compliqué. De là, des portes se sont ouvertes, quand on a présenté le projet au maire de Fos-sur-Mer et aux entreprises des alentours (Sébastien est le premier accompagnement réalisé par Sport Society). Moi, à côté de ça, j’avais envoyé des CV, un petit peu partout, mais quand tu n’as pas d’expérience sur le terrain, tu as beaucoup de portes qui se ferment. Mais là, avec James, une porte s’est ouverte, celle de l’entreprise de KEM ONE à Fos-sur-Mer, dans laquelle j’ai pu faire un stage de deux semaines pour découvrir le métier d’Opérateur Extérieur, pour voir ce que c’était et si ça me plaisait. Parce qu’après l’usine paie ta formation, donc ils ne peuvent pas accepter n’importe qui, il fallait que je sois sûr de mon choix. J’ai accepté, ça m’a plu, je suis parti faire le Brevet d’Opérateur, en alternance sur 1 an, à l'IFP Training à Martigues, où ça s’est très bien passé. Aujourd’hui, je suis encore CDD et je devrais bientôt signer un CDI.

 

 

Tu penses que ton parcours de sportif professionnel a été un bénéfice pour l’entrée dans ce nouveau monde ou l’inverse ?

 

C’est un bénéfice, oui et non. Oui, parce que tu as des valeurs, tu partages, tu rencontres des gens, et de toute culture. C’est bénéfique parce que le sport t’apprend énormément, et le sport, c’est la santé. Il faut faire du sport. Mais en même temps,  ta carrière te coupe un petit peu du monde, tu ne vois pas la réalité, tu sais comment ça se passe à côté, tu sais que les gens se lèvent à 5h du matin pour aller au travail. Moi, je vois le quotidien de mes parents qui étaient ouvrier et employé, ils ont toujours trimer. Tu le sais, tu le vois, mais toi ça t’atteint pas parce tu es là-haut, tu gagnes un peu plus d’argent, tu fais ce qu’il te plait, donc forcement, là-dessus, ce n’est pas bénéfique.

 

 

Comment se passe ta vie professionnelle maintenant ? Comment avez vous trouvé équilibre ? Toujours un peu de sport ?

 

Ce qui était important pour moi, c’était de retrouver une vie de famille, parce que quand t’es joueur tu fais beaucoup de sacrifices. Mais je me suis rendu compte, qu’il y a beaucoup de similitudes entre le sport et ce que je fais aujourd’hui en tant qu’opérateur extérieur. Déjà, c’est une activité extérieure. Aussi je fais les trois 8, donc un planning de travail qui change tout le temps, et ça ne me dérange pas du tout parce que j’avais déjà cette habitude en tant que footballeur : parfois on s’entrainait le dimanche, parfois le matin, parfois l’après-midi. Ensuite, tu as la cohésion de groupe, tu es 7 ou 8 par équipe, tu partages des valeurs, tu partages pleins de choses. Et puis, c’est quelque chose pour laquelle tu es assez bien payé, c’est bien de pouvoir mettre du beurre dans les épinards pour ta famille. Aujourd’hui, tout se passe bien, je suis en fin de formation pour obtenir un CDI, et j’espère que ça va se faire assez rapidement, les gens de mon usine sont satisfaits de mon travail pour l’instant, j’espère que ça va continuer. C’est le début d’une nouvelle vie hors football, j’espère que ça va bien se passer.

 

Merci Sébastien.

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